Vulnérabilité de l’ordinaire

dans Sandra Laugier et Pierre Fasula (dir.), "Concepts de l'ordinaire"

Le concept de l’ordinaire n’est jamais mieux défini que dans sa perte, si souvent représentée dans la fiction (situations de catastrophe, perte de ce qui fait la trame de l’humain) et quotidiennement dans les moments de dissolution des échanges ou du cours de la vie ; situations qui incitent à réaliser et représenter ce qui est perdu : d’une normalité tenue pour acquise et invisibilisée, jusqu’au moment où elle s’effondre, et où il faut alors la réinstaurer, comme dans les stratégies de réparation chez Goffman. Mais dans tous ces cas, la rupture a mis en évidence la vulnérabilité de l’ordinaire, le fait qu’il est toujours déjà perdu ou d’emblée mythologique. Il s’agirait alors de faire retour, pour reprendre une expression de Stanley Cavell, « là où l’on n’a jamais été » – d’où ce qu’il appelle « l’inquiétante étrangeté de l’ordinaire », et de la vie ordinaire comme par définition ce qui est menacé, voire inaccessible.

 

Citer ce chapitre de livre : Laugier, S. "Vulnérabilité de l'ordinaire", dans Sandra Laugier et Pierre Fasula (dir.), Concepts de l'ordinaire, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2021, pp. 165-187. ⟨10.4000/books.psorbonne.99585⟩⟨hal-03744361⟩