Fictions du secret, secrets de la fiction

Quels points communs entre la collection sas, la saga James Bond et la série télévisée Le Bureau des légendes ? Les nombreuses différences d’ambiance, de ton ou de personnages entre ces différents types de récits font probablement du genre de l’espionnage l’un des plus divers de la création contemporaine. Pourtant, une telle diversité n’interdit pas la convergence vers un élément : le fait que ces fictions donnent à voir le « secret de l’État », incarné dans l’action des agences et services dits de « renseignement ». Dans un contexte où la demande d’informations concernant les activités secrètes des États ne cesse de croître, et où la ligne de démarcation entre « fait » et « fiction » semble constamment brouillée, les fictions d’espionnage répondent à une double exigence : d’une part, la prétendue mise en visibilité de ces acteurs de l’ombre, dont l’opacité structurelle met au défi le principe démocratique de publicité ; d’autre part, leur dissimulation plus efficace sous couvert de mise en transparence. Plus que de simples miroirs, qui refléteraient de façon plus ou moins réaliste un monde autrement inaccessible, ces fictions sont une condition du secret en démocratie.

 

Citer cet article : Blistène, P. (2021). Fictions du secret, secrets de la fiction. Inflexions, 47, 133-140. https://doi.org/10.3917/infle.047.0133. ⟨hal-03754916⟩